Les lauréats du 35ème Festival International de la bande dessinée d'Angoulême sont :
Fauve d'or, prix du meilleur album : "Là où vont nos pères" de Shaun Tan (Dargaud).
"Un homme arrive dans une étrange contrée et tente de s'habituer à la vie et aux mœurs bizarres des habitants de ce pays. Il a laissé derrière lui femme et enfants pour leur assurer une vie meilleure... Shaun Tan, dessinateur australien né en 1974, traite ici du thème de l'immigration sous une forme métaphorique, convoquant une imagerie fantasmagorique. En résulte une histoire universelle, car tout un chacun pourra s'identifier au parcours de cet homme, à travers les yeux duquel le lecteur vit l'expérience tantôt douloureuse, tantôt enthousiasmante de l'adaptation à une autre culture."
Cette BD muette tient à la fois du récit fantastique, du conte initiatique et du livre d’histoire.
Essentiel FNAC SNCF : "Kiki de Montparnasse" de Catel et José-Louis Bocquet (Ecritures / Casterman).
"En 1913, une gamine mal dégrossie qui se nourrit de saucissons à l'ail et de vin rouge quitte sa bourgogne natale pour s'installer à Paris. Rien ne la prédestinait à une carrière artistique, mais la jeune fille a un flair de coquette pour repérer les jeunes talents capables de la peindre, de l'embellir et de la rendre éternelle. Cette première biographie dessinée de Kiki de Montparnasse signée Catel et Boquet nous plonge dans le Paris très libertin des années 20 et raconte avec émotion la grandeur et la décadence d'une véritable star."
Cet album a déjà reçu le Grand Prix RTL 2007.
Les essentiels d'Angoulême :
- "Exit Wounds" de Rutu Modan (Actes Sud BD).
"Israël, 2002. Liés malgré eux par l'identité inconnue d'une victime d'attentat kamikaze, Numi et Koby mènent l'enquête pour retrouver un homme - l'amant de la première, le père du second. A travers leurs recherches désespérées, ponctuées de bonnes et de mauvaises surprises, Rutu Modan (née en 1966) dresse le portrait d'une société en perte de repères, et, plus symboliquement, de pères... Porté par un dessin minimaliste, ce roman graphique apporte, par le prisme de la fiction, un témoignage humaniste de la vie au Proche-Orient."
- "Ma maman est en Amérique, elle a rencontré Buffalo Bill" de Jean Regnaud et Emile Bravo (Gallimard).
"Jean, un petit garçon touchant, nous dévoile ses petites aventures du quotidien avec son institutrice revêche, son papa surbooké, sa nounou Yvette (la reine du chocolat glacé), sa voisine Michèle ainsi que son petit frère Paul (avec qui il n'arrête pas de se battre)... Toutes ces petites choses banales et drôles qui semblent faire de lui un petit garçon comme les autres. Même s'il cherche à fuir cette question : « Où elle est ma maman ? ». Avec sensibilité et émotion, Bravo et Regnaud racontent ces moments de vie en nous rappelant que les enfants ne sont pas seuls à préférer s'inventer des histoires plutôt que d'affronter la réalité..."
- "La Marie en plastique" de Pascal Rabaté et David Prudhomme (Futuropolis).
"Sous le toit d'un pavillon de province vivent trois générations d'une même famille. Le père est artisan, la mère reste au foyer, et les deux enfants sont sans histoire. Il n'en va pas de même pour les grands-parents maternels. Lui bouffe du curé à tous les repas, elle revient de Lourdes avec dans sa valise une statuette en plastique représentant la Vierge. L'altercation entre les deux aïeuls ne tarde pas et toute la famille en profite... Le reste, dont un miracle et un repas de communion solennelle, est à la fois hilarant et dérisoire. La réussite de Rabaté est de nous rendre palpitants et surtout drôles des moments que nous connaissons tous intimement comme insignifiants, voire pénibles. David Prudhomme met cela en images avec une clarté et une fluidité qui n'empêchent pas les audaces chromatiques et de découpage."
- "RG" de Frederik Peeters et Pierre Dragon (Bayou / Gallimard).
"Que sait-on de la vie des policiers, au-delà des clichés du polar ? Ce récit très réaliste nous plonge dans le quotidien d'un inspecteur, en dévoilant le secret des planques, des heures passées dans les camionnettes banalisées, des photos prises aux téléobjectifs et des filatures... Ces « effets de réel » particulièrement impressionnants ont été inspirés par un vieux briscard des renseignements généraux. Une ambiance de vécu à 400% grâce au récit de Pierre Dragon et au dessin saisissant de Frederik Peeters, qui réalise l'un de ses albums les plus inattendus."
- "Trois ombres" de Cyril Pedrosa (Shampooing / Delcourt).
"Reclus du monde et de ses malheurs, Joachim et ses parents vivaient en paix au creux des collines, jusqu'à ce que l'ombre de trois mystérieux cavaliers n'apparaisse et ne vienne perturber leur tranquillité. Dès lors, le destin de Joachim va se trouver irrémédiablement changé. Pour échapper à la menace des trois ombres, il ne lui restait plus qu'une issue : fuir ou se soumettre. C'est évidemment la première option que choisit le père du garçon, en se lançant à corps perdu dans un long et périlleux voyage, à l'issue incertaine. Magnifique parabole sur la mort insupportablement douloureuse d'un enfant, ce conte initiatique est porté par un graphisme au dynamisme époustouflant."
Essentiel révélation : "L'éléphant" d'Isabelle Pralong (Vertige Graphic).
"Entre votre travail de costumière de théâtre, votre mari, vos enfants, vous vivez une vie régulière, heureuse. Et voilà qu'on vous appelle de l'hôpital pour vous dire que votre père est dans le coma. Un père que vous ne connaissez pas, puisqu'il a déserté votre vie depuis le début. Comment accepter cette soudaine irruption et aussi, comment se débrouiller de sa mort, annoncée comme proche ? Voilà ce que raconte Isabelle Pralong, en une suite de courts chapitres dépourvus de pathos, dans un traitement graphique expressionniste. Du refus initial à une forme de réconciliation avec cet homme inconnu, et finalement avec soi-même, tout est dit dans ce bel album avec une pudeur et une justesse remarquables."
Essentiel patrimoine : "Moomin" de Tove Jansson (Le Petit Lézard).
"Tove Jansson, artiste finlandaise (1914-2001), fut peintre et illustratrice, mais surtout l'auteur des aventures de Moomin le Troll, personnage inventé pendant la Seconde Guerre mondiale pour apporter un peu d'évasion et de réconfort aux enfants. Lue depuis cette époque dans le monde entier et considérée comme un classique, cette œuvre romanesque relevant du merveilleux et de l'humour fut adaptée en bande dessinée par Tove Jansson elle-même, ensuite remplacée par son frère Lars. Ce premier recueil, d'une production irréprochable, permet d'entrer de plain-pied dans un monde folâtre et imprévisible, peuplé de créatures étranges (des Snorks, des Hatifnattes, un Stinky vorace qui sent extraordinairement mauvais...) et pourtant immédiatement familières. Recommandé aux enfants de tous les âges !"
Prix de la BD alternative : Turkey Comix n°16.
"Turkey comics a abandonné sa fameuse reliure maison “trouée-cousue” pour un dos carré plus classique pouvant rassembler quelques 222 pages de BD et réunir une trentaine d’auteurs. L’édito plutôt pugnace, titré “Ce que nous combattons”, situe les ambitions résolument “hors du confortable vase clos des récupérateurs et des faiseurs de hype qui asphyxient la bande dessinée”. De fait, la plupart des auteurs “maison” progressent ensemble, créant une belle homogénéité, et une dynamique que l’on ressent à la lecture, plaisante, surprenante. Notons le “Francis Bear” (Gregory McKay) au graphisme très abouti et à la narration aventureuse, “Eleanor” délicat récit d’ambiance mettant en scène une jeune “journaliste” qui interviewe une prostituée, les pages facétieuses de Tarabiscouille, un hommage paradoxal de Bertoyas par M. Bancal (lequel Bertoyas participe d’ailleurs), “Un homme” par Stygryt récit drôle et bien mené, “Bonheur partagé”par Danny Maltais (une histoire bien trashy) et le témoignage-hommage par Gotpower et Bunk à leur ami décédé Ludovic Vandame. Le tout est ponctué de magnifiques dessins pleine page de Christophe Hittinger. "
Essentiel jeunesse :"Sillage - tome 10 : Retour de flammes" de Philippe Buchet et Jean-David Morvan (Delcourt).
Les prix jeunesse 7/8 et 9/12 ans du Festival ne font plus qu’un et constituent désormais le prix« Essentiel Jeunesse » dont le jury est composé d'enfants de 9 à 14 ans.
Hors sélection officielle :
Prix jeunes talents :Patrick Morin pour sa planche "Maroc", Camille Burger (2e lauréat) pour "Zooland Trooperz" et Julien Dessailly (3e lauréat) pour "Les mains libres."
Prix de la BD scolaire : Le prix d'Angoulême est décerné à Richard Beaumois, élève de 17 ans du lycée Jean-Paul Sartre à Bron, le prix du meilleur graphisme à Mina Perrichon, 17ans du lycée Jean Dautet de La Rochelle, le prix du meilleur scénario à Vincent Caut, 15 ans du lycée Jacques Amyot de Melun, le prix Humour à Louis Granet, 15 ans, du lycée François Magendie à Bordeaux.
Prix de "La Rencontre" : Kim Gérard.
"L’Office franco-québécois pour la jeunesse, en partenariat avec le Festival international de la bande dessinée d’Angoulême et le Festival de la bande dessinée francophone de Québec, a organisé un concours sur le thème de « La Rencontre », thème sous lequel se dérouleront les festivités liées au 400e anniversaire de la ville de Québec en 2008."
Le blog est un nouveau support qui a permis de révéler un grand nombre de talents, il était temps que les blogueurs soient reconnus comme de jeunes auteurs en devenir. Le Festival International de la Bande-dessinée et le Pavillon Jeunes Talents ont donc décidé de remettre pour la première fois un prix récompensant trois jeunes auteurs de bande-dessinée issus du blog. Prix BD des collégiens de Poitou-Charentes : "L'envolée sauvage" de Laurent Galandon et Arno Monin (Bamboo).
"France, 1941. Jeune orphelin fasciné par les oiseaux, Simon vit dans sa campagne, loin de la tourmente. Pourtant, l'antisémitisme s'insinue progressivement jusque dans son quotidien pour lui rappeler qu'il est juif.
Confronté à la bêtise humaine, Simon va devoir fuir. Pourtant, où qu'il se trouve, la Dame Blanche apparaît : prédateur de mauvais augure ou ange gardien nocturne ? Sa fuite l'emmènera jusque dans les montagnes où il pensera trouver un nouveau temps de paix. Mais la gangrène se propage et sa descente aux enfers ne fait que commencer...
Tout au long de sa fuite, Simon apprendra que vivre dans un monde libre s'avère plus difficile que de vivre enchaîné."
Autres prix remis lors du festival :
Prix René Goscinny : "Le Guide du moutard, pour survivre à neuf mois de grossesse" de Jul (Vents des Savanes).
« Cela part d’un truc très personnel de l’ordre du journal de bord de grossesse… On se rend vite compte que cet univers de la grossesse, des enfants,... c’est vraiment le miroir dans lequel se reflète tout une société. Il y a toutes sortes de problèmes, d’angoisses qui sont présents. Et en plus, il se trouve que le timing de cette grossesse qui est raconté dans cet album correspond exactement avec la campagne présidentielle en France et donc, ça commence avec le thème de la rupture de Sarkozy et celui de l’ordre juste de Ségolène. L’accouchement a lieu pendant le débat Ségo/Sarko. Les sages femmes sont complètement obnubilées par le débat et n’ont pas du tout la tête à ce qu’elles font... »
Prix de la BD chrétienne francophone : "Le voyage des pères" de David Ratte (Paquet).
"Galilée, 1er siècle de notre ère. Un beau matin, Jonas, vieux pêcheur juif, vois avec une pointe d'ahurissement ses fils, Pierre et André, tout plaquer pour suivre un certain Jésus de Nazareth. Il décide alors de tout faire pour retrouver sa progéniture et la ramener dans le droit chemin. Il sera bientôt rejoint par d'autres pères, tout aussi inquiets que lui de voir leurs fils devenir des apôtres ...
Le jury, composé de personnalités catholiques, protestantes et orthodoxes, a récompensé la qualité graphique, le caractère des personnages évoluant dans un scénario de fiction historique et biblique original.
Prix œcuménique : "Chroniques du proche étranger en Tchétchènie" de Tamada et Rash (Vertige Graphic).
"Un jeune médecin français et son chauffeur tchétchène tentent, parmi d'autres, d'apporter à une population fuyant la guerre en Tchétchènie, une aide " utile quoique dérisoire ". Leur route est semée de rencontres, qui juxtaposent, à l'horreur de la guerre, des situations émouvantes et dignes, décalées et drôles, comme seule la vie peut en produire dans un tel contexte."
Ce prix, décerné par un jury de critiques, d'historiens, de journalistes, de spécialistes et d'amateurs de bande dessinée, récompense un album choisi pour l'ensemble de ses valeurs humaines et esthétiques.
Prix Tournesol : "Betelgeuse – tome 5 : L'autre" de Léo (Dargaud).
"L’univers lumineux et dépouillé d'humains étranges qui vivent de drôles d’aventures au contact d’une nature fascinante…"
Ce prix, décerné par les Verts, distingue la bande dessinée la plus écolo de l'année. Le jury, composé de 4 représentants de ce parti politique et du vainqueur de l'an passé (Otto T), a récompensé cette série de science fiction à dimension humaine qui met largement en avant des préoccupations environnementales.
Prix Artémisia : "Nos âmes sauvages" de Johanna Schipper (Futuropolis).
Dans cet ouvrage qui relate un voyage en Haute-Amazonie, l'auteure nous propose un regard sensible, sincère et lucide sur son temps.
Ce prix, décerné par un jury féminin, récompense un album de bande dessinée scénarisé et/ou dessiné par une ou plusieurs femmes.
Et pour finir un petit rappel :
Prix Décoincer la bulle : "La ligne de fuite" de Benjamin Flao (Futuropolis).
"L’album, scénarisé par Christophe Dabitch, se déroule à Paris à la fin du 19e siècle. Arthur Rimbaud a disparu des cercles littéraires et parisiens depuis une douzaine d’années, mais son œuvre a marqué à tout jamais la poésie. Parmi ses admirateurs, Adrien, poète amateur, est mandaté par le journal Le Décadent pour écrire de faux alexandrins de Rimbaud. Le journal est attaqué par Verlaine."
Ce prix, décerné par les centres E. Leclerc et l'hebdomadaire Paris Match, vise à soutenir la carrière de jeunes dessinateurs prometteurs.